Rapport d’étude en RD Congo

1 – La fin de l’ère coloniale

La poussée démographique et la forte industrialisation eurent pour effet d’accentuer les problèmes d’urbanisme et d’habitat. La colonie devrait faire face aux nouveaux problèmes sociaux comme l’exode rural, l’encombrement des cités indigènes par la venue des « parents » du village, l’augmentation du nombre des « évolués ». Ainsi le gouvernement colonial élabora en 1947 un plan d’urbanisation de la colonie.

Ce plan visait également la construction des logements sociaux avec l’appui des entreprises. Ces dernières avaient pour obligation de construire des logements pour leurs travailleurs. Ainsi, dans toutes les grandes villes, les entreprises publiques et privées (OTIC, l’UMHK, la SOMINKI, PLZ, ELBEMA, CILU, …construisirent des camps pour loger leurs travailleurs. (Mbuyi, 2020 : 62)

Les zones d’exploitation des minerais, le long des chemins de fer, les concessions fermières et agricoles, les grandes usines de production étaient des sites où l’on pouvait retrouver deux types de logement. Celui des travailleurs blancs, qui remplissaient toutes les normes pour une résidence décente et des maisons que l’on qualifierait sans doute de cabane, des maisons de type simple, de deux ou trois pièces, sans aucun confort.  En dehors de ces zones de production, il n’y avait aucune politique de logement.

Le rôle de la femme était pratiquement inexistant. Il ne pouvait qu’en être ainsi dans une société où la femme est appelée à vivre sous l’ombre d’un homme si elle est mariée ou sous l’ombre de ses parents ou ses enfants adultes dans le cas contraire, et ce, quel que soit son âge. Il ne pouvait donc pas y avoir une politique de logement stricto sensu pour les femmes.

La politique sociale de logement était pratiquement abandonnée aux entreprises qui devraient s’en occuper selon leur guise. Les meilleures conditions de logement étaient réservées aux colons tandis que les cabanes, sans confort, étaient des amas des briques érigées pour héberger les tout travaux.

L’on peut déduire de ce qui précède que durant cette période sous examen, le Royaume de Belgique était en proie à plusieurs luttes politiques au centre desquelles se trouve la guerre idéologique. Les gouvernements qui se succédèrent entre 1940 et 1960, au total 15, vont tenter, chacun à sa manière, d’influencer la politique sociale dans la colonie. C’est plutôt le gouvernement de l’union nationale dirigé par Hubert Pierlot, à partir de Londres en exil et composé du Bloc Catholique, du Parti Libéral et du Parti Ouvrier Belge qui initia plusieurs projets de réformes des politiques sociales. Cette attention est une conséquence de l’effort de guerre supporté par la colonie et surtout l’action remarquable de la Force Publique Congolaise dans les rangs de la Belgique pendant la deuxième guerre mondiale.

La mise en œuvre des politiques sociales dans la colonie était une affaire des étatiques et des non-étatiques. Parmi les étatiques, nous retiendrons le gouvernement Belge, à partir de la métropole, qui concevait et orientait la politique coloniale que suivait et matérialisait pour son compte le Ministre de la Colonie. Au niveau local, l’on retrouvait le gouvernement colonial que dirigeait le Gouverneur Général. C’est lui avec son gouvernement qui appliquait les décisions de la métropole à travers des ministres sectoriels. Ces derniers pouvaient compter sur les autorités de la territoriale, à savoir les gouverneurs de province, les administrateurs de territoires et les chefs des entités locales pour s’assurer de la mise en œuvre de la politique sociale dans leurs milieux respectifs.

Parmi les non-étatiques, nous pouvons retenir avant tout les confessions religieuses. Ce sont elles qui ont permis justement au gouvernement colonial d’asseoir son autorité dans les territoires à travers l’évangélisation. L’église catholique a ainsi joué un rôle déterminant dans le changement culturel ayant conduit à l’acceptation par les autochtones des réformes proposées par l’Etat. Le système de l’enseignement dans la colonie par exemple, n’aurait jamais vu le jour sans l’apport déterminant des églises. Nous avons également, parmi les non-étatiques, les entreprises. Il s’agit des grandes firmes qui évoluaient principalement dans l’exploitation minière et dans les activités agropastorales. L’Etat colonial comptait sur elles pour mettre en œuvre les projets sociaux de logement et de l’emploi.

La question essentielle dans la mise en œuvre des politiques sociales était celle de leur financement. Il fallait donc une contribution tripartite à cet effet : la métropole, le gouvernement colonial et les entreprises. Chacun de ces trois partenaires activait, sur ordre de la métropole, des actions à mener dans le cadre de la politique sociale. Seule la politique du logement qui était exclusivement réservée aux entreprises. Ces dernières devraient s’occuper du cadre de vie de leurs employés. Le rôle de l’Etat ne s’étant limité qu’à l’urbanisation et à l’aménagement de territoire.

Il se dégage globalement de l’analyse des politiques sociales durant la période sous examen deux principales tendances. La première. La consolidation de la politique coloniale dans les quatre secteurs. Celle-ci a entraîné, sans nul doute, une amélioration qualitative des conditions de vie des populations. Mais aussi, un peu plus d’instruits qu’avant, l’administration des soins de qualité à un coût accessible au plus grand nombre, la formalisation du circuit de travail et la reconnaissance de quelques droits aux travailleurs, dont celui d’association. C’était aussi le début de l’insertion des femmes dans le circuit économique et social. La seconde : l’insatisfaction croissante des autochtones face aux injustices. Cette situation se justifie pleinement par la théorie des besoins de Maslow.

2 – L’ère post indépendance 1960-1965

La crise congolaise post indépendance est une période de troubles politiques et de conflit ayant eu lieu en RDC entre 1960 et 1965. La crise commence presque immédiatement après l’indépendance du pays et prend fin avec l’accession à la présidence de Mobutu en 1965. Cette période était caractérisée par la mutinerie des militaires, l’agression belge, l’assassinat du premier ministre Lumumba, les sécessions, des rébellions, les départ massif des colons, l’agression du pays par le Belgique, l’intervention des nations Unies pour sécuriser la population locale, etc.[1]

Finalement, les cinq gouvernements qui se sont succédé en cinq ans n’ont pas pu concevoir, chacun en ce qui le concerne, des politiques sociales en faveur de la population. Tous les efforts du pouvoir public étaient consacrés au rétablissement de la paix et à la recherche de l’unité nationale, volée en éclat. En outre, le pays faisait face à des difficultés financières étant donné qu’il était privé des ressources minières à cause de la sécession des trois provinces minières et devrait par ailleurs faire face à l’effort de guerre.

Ainsi, après l’indépendance, le pays qui était censé hériter des bienfaits de l’époque coloniale dans plusieurs domaines sera pratiquement bloqué. Le départ massif et précipité des belges a paralysé tous les secteurs clés. L’enseignement et l’éducation, deux secteurs qui étaient totalement assurés par les colons ont connu brusquement un dysfonctionnement. Les enseignants et les médecins belges, du reste qualifié, ont été du jour au lendemain remplacés par des congolais sans niveau requis. Livrant ainsi ces deux secteurs sensibles entre des mains inexpertes.

Le secteur de l’emploi et de logement n’avait pas bougé non plus dans la mesure où la situation de la guerre chronique rendait difficile la mise en place des projets dans ces deux domaines. La dépréciation de la monnaie, l’augmentation du coût de la vie et le taux élevé du chômage étaient les caractéristiques de cette période. Cette situation trouve son fondement dans le manque de préparation des hommes politiques, la carence quasi-totale des cadres, les querelles tribales, les ambitions démesurées des certains leaders politiques et les convoitises internationales.

La Belgique était au centre de la manouvre de la déstabilisation du pays à travers, notamment la manipulation des acteurs politiques, cristallisée surtout par la sécession katangaise et l’envoie des parachutes belges sous le prétexte de protéger des sujets Belges résidents encore au Congo. Se souvenant de cette période, l’universitaire congolais Loka affirme : « les gens se demandaient quand est-ce que l’indépendance prendra-t-elle fin ? »[2]

Accusée par le gouvernement congolais d’agression et d’ingérence, la Belgique, selon plusieurs études[3], mettra tout en œuvre pour rendre le pays ingouvernable. Ce qui préjudicia tous les projets de développement initiés par les colonisateurs qui étaient en cours d’exécution et rendait finalement impossible d’en initier d’autres. C’est dans ce contexte de chao que le Congo sera finalement sous l’assistance de l’ONU. C’est la Mission de l’Onu au Congo qui tentera d’organiser des interventions pour restaurer la paix et instaurer un nouvel ordre politique. Devant la persistance de la misère et la dégradation constante de la situation du pays, un changement politique par la force est alors soutenu par les puissances occidentales.

3 – La période du monopartisme et de l’ajustement structurel : 1965-1990

La politique de logement était très dynamique au Zaïre. Tout a commencé avec la réglementation dans ce secteur. Il fallait donc revoir le décret du gouverneur général de la colonie du 20 juin 1957 sur l’autorisation de bâtir.  Désormais l’arrêté ministériel du 14 juillet 1967 dispose, en son article 5, que « tous les territoires sont soumis au régime de l’urbanisme ». Cette disposition, souligne Léon Mbuyi, augura la nouvelle politique gouvernementale de l’urbanisme et habitat au zaïre (Mbuyi, 2020 : 37).

Par ailleurs, le gouvernement élaborera le plan d’aménagement de chaque province, en élucidant les différents types d’infrastructures à construire. La matérialisation de ce plan débutera par la création des structures étatiques suivantes : le bureau d’étude d’aménagement et de l’urbanisme, la Société de Construction et de Logement et l’Office National de Logement.

Ainsi, dans la ville de Kinshasa par exemple, des quartiers entiers avec des bicoques seront complètement rasés au profit des cités modernes : Salongo, Léopard, Badiadingi, Maman mobutu, Verte, Mimoza, etc. Dans toutes ces cités, relève Léon Mbuyi, que l’on pouvait retrouver dans tous les chefs-lieux des provinces, y étaient construites des villas en maçonnerie (Mbuyi, 2020 : 124).

En 1982, c’est grâce à l’appui du programme interministériel français REXCOOP et la participation de la Caisse Populaire des Crédits, LUYMAS, que le gouvernement a réalisé un projet de soutien à l’auto–construction, via un système de prêt en nature, la fabrication locale des matériaux, la formation des artisans menuisiers, charpentiers et maçons.

D’autres projets verront les jours à partir de 1983 dans le cadre du logement. C’est le cas notamment du Logement Economique (LOGEC), une structure chargée des montages financiers, au service des entreprises publiques, afin de construire des logements à leurs cadres et agents. C’est ainsi que les grandes entreprises comme Air Zaïre, la Société Nationale de l’Electricité, la GECAMINES, le REGIDESO, la banque Centrale du Zaïre… ont pu acquérir pour leurs agents des cités modernes. C’est aussi le cas du projet de l’Habitat pour l’Humanité. Ce projet était conçu pour aider les ménages dans les milieux ruraux essentiellement d’avoir un toit dans les conditions requises.  Au total, ce projet au pu construire, dans différents territoires 130 cités modernes. Cependant, avec la crise des années 80, ce rythme impressionnant de construction va s’arrêter brusquement. Ouvrant ainsi la voie aux constructions anarchiques dans les villes et entités zaïroises.

Il ressort de l’analyse des politiques sociales, sous cette période, que le nouveau régime politique zaïrois, bien que bénéficiant d’un soutien de l’ancienne puissance coloniale (ce qui n’était pas le cas avec le régime précédent), manifestait ouvertement son ambition de sortir des sentiers bâtis des colonisateurs. Ce souci peut s’expliquer par la recherche d’une certaine légitimité en voulant faire mieux que le régime précédent. Mais aussi par le fait que le pays devrait faire face aux nouveaux problèmes au regard de l’évolution sociétale, en termes de la démographie, de l’apparition d’une élite nationale et d’une certaine concurrence avec des pays voisins.

Partant de ce qui existait déjà dans les domaines de l’éducation, de la santé de l’emploi ou du logement, le premier réflexe des nouvelles autorités était de légiférer dans ces différents secteurs. Le deuxième effort était de concevoir des plans ou programmes nationaux pour prendre en charge ces secteurs. Le troisième effort était de trouver des moyens pour les financer. Ce qui explique une dynamique gouvernementale dans les secteurs sous études. Il y a aussi l’accompagnement et le soutien de la population à ces politiques au regard de leurs incidences dans son vécu quotidien.

Ainsi, les traces de l’héritage colonial s’effaçaient progressivement et s‘affichaient désormais les marques du régime mobutien, qui s’auto-qualifiait de « bâtisseur de la nation ». Cependant, la nouvelle élite politique et économique, cette nouvelle génération des dirigeants zaïrois, n’avait pas de repères autres que ceux les colonisateurs. Ils se comportaient à peu près comme les oppresseurs face au petit peuple. En effet, une nouvelle bourgeoisie naquit et prît la place des colonisateurs. Cela va se remarquer dans les tendances discriminatoires entre les nouvelles classes sociales qui verront le jour.

Le gouvernement zaïrois s’était engagé dans des politiques sociales pour améliorer les conditions de vie de la population qui s’étaient fortement dégradées durant les cinq années postindépendance. La tendance du pouvoir public était de faire mieux que le pouvoir colonial afin de se délégitimer dans un pays où le nombre des nostalgiques de la colonisation ne cessait de croître. Il fallait donc partir des problèmes sociaux tels qu’ils se présentaient et de tenter de les résoudre. Le dialogue social était par conséquent le canal par lequel le pouvoir cernait les préoccupations de la population avant de les résoudre dans le cadre des politiques sociales.

Ces différentes politiques sociales ont été initiées par le pouvoir public et par lui également implémentées. Ce qui revient à dire que leur financement était assuré intégralement par le pouvoir public.

Ces différentes politiques étaient menées de manière systématique et sur l’ensemble du pays. Il sied cependant de relever que les politiques de l’éducation et de la santé ont eu une certaine prééminence par rapport à celles de l’emploi et du logement. Ce déséquilibre trouve son fondement dans l’importance que le pouvoir accordée à la formation des cadres dont le nombre était limité dans un pays qui voulait vite rattraper son retard de développement. La sensibilité du secteur de la santé ainsi que l’apparition des pandémies obligeaient le gouvernement à investir un peu plus sur le secteur de la santé.

Avec l’avènement de la crise socioéconomique, l’on a ressenti le ralentissement dans la mise en œuvre des politiques sociales. Les restrictions budgétaires imposées par les bailleurs des fonds ont conduit le gouvernement à faire des coupes mêmes dans les secteurs vitaux comme la santé et l’éducation, dégradant ainsi les conditions de vie de la population. Le gouvernement devrait alors tendre la sébile aux partenaires pour garantir tant soit peu les conditions de vie de la population. Ainsi, seuls les secteurs sensibles comme la santé et l’éducation qui seront priorisés, à faible proportion d’ailleurs. Quant à l’emploi, il ira sans cesse en decrescendo au moment où les questions du logement seront simplement renvoyées au calandre grec.

Le président de la République, le chef du parti-Etat et de l’exécutif national, était au cœur du système des politiques sociales. C’est lui qui orienter le parlement pour légiférer sur les politiques sociales que devraient appliquer les ministres sectoriels et même les autorités politico-administratives dans les entités locales.

Evidemment, l’Assemblée nationale, en tant qu’institution chargée de légiférer et de contrôler l’action gouvernementale, évaluait et formulait des observations pour la bonne exécution desdites politiques.

Pendant la crise, l’Etat pouvait recourir aux partenaires et aux églises pour s’occuper du secteur de la santé et de l’éducation. Le domaine de l’emploi et du logement étaient pris d’assaut par la population elle-même. C’est l’essor de l’informel, de la débrouillardise pour vivre et l’apparition des quartiers périurbains où pullulent toutes sortes de constructions anarchiques et des cabanes.

 4 – Période de transition politique 1990-2006

A partir de 1991, la production du cuivre a presque cessé en RDC. Certaines exportations agricoles traditionnelles sont devenues non compétitives (coton, huile de palme, maïs), et le pays n’exportait presque plus. Les entreprises publiques devinrent des canards boiteux ; certaines d’entre elles ferment carrément. Beaucoup d’entreprises privées tombent aussi en faillite.

Le pays va vivre du secteur informel et de l’extraction des diamants. Avec la guerre, à partir de de 1996 jusqu’en 2003, l’Etat avait pratiquement cessé de fonctionner normalement. Le budget de l’Etat était en dessous d’un milliard de dollars l’an. Ce qui aura globalement un impact néfaste et direct sur le secteur de l’emploi. En dépit de ce tableau sombre, le gouvernement n’initiera entretemps aucune politique sociale de l’emploi. Il en sera de même pour le secteur de logement.

Si l’ensemble de la société sera victime de cette situation, les femmes et les enfants en paieront quant à eux le plus grand prix. Plusieurs femmes au cours de cette période perdront leur emploi, et donc leur indépendance sociale. Les femmes au foyer devraient aussi broyer du noir du fait que leurs époux n’étaient plus en mesure de pourvoir suffisamment à leurs besoins. Elles vont toutes se tourner vers la débrouillardise, l’informel. C’est justement ces activités de la femme qui vont les rendre de nouveau indépendante et à même de soutenir véritablement les ménages. L’espoir de plusieurs familles reposait désormais sur les femmes qui devinrent, grâce à leurs activités, des productrices des revenus.

L’on peut déduire de ce qui précède que cette période sous examen était caractérisée par le désordre, des troubles et l’essor des antivaleurs. Les anciens belligérants étaient tous dans la logique électorale. Cet aspect aura une influence remarquable sur les actions sociales menées qui s’apparentaient au saupoudrage et de la propagande ; car n’ayant rien des politiques sociales mises sur agenda politique, jouant leur rôle traditionnel.

Les différents gouvernements qui vont se succéder au cours de cette période n’ont pas comme principale préoccupation l’amélioration des conditions de vie. Déjà issus des coups d’Etat, ces gouvernements avaient du mal à asseoir leur légitimité. Il eut donc des cassures entre le ces régimes et la population, alimentées sans cesse par l’inactivisme étatique.  A partir de 1996, c’est la question de la guerre, du retour à la paix et à la stabilité constitutionnelle qui ont talonné les esprits. Les secteurs de l’éducation et de la santé seront globalement pris en charge par des partenaires étrangers et des privés au moment où l’informel s’était enraciné dans le secteur de l’emploi et de logement. Et, dans certains cas, l’initiative et même le financement des politiques sociales endossées le gouvernement étaient en réalité l’œuvre des partenaires internationaux dans le cadre d’appui à un pays en conflit ou post-conflit.

5 – La période post-transition et post-conflit : 2007-2018

Depuis 2006, le secteur de logement est une compétence exclusive des gouvernements provinciaux. Chaque province devrait mettre en place sa politique y relative. Globalement, l’on assisté la création dans des provinces des offices des logements, qui ont initié plusieurs projets de construction de logements sociaux.

Dans la ville province de Kinshasa, selon Clément Nzau[4], directeur technique honoraire de la Direction Générale de Logement de Kinshasa, plusieurs partenaires avaient souscrit à leurs initiatives et avaient promis d’accompagner l’exécutif provincial en vue de leur matérialisation. Cependant, le faible pouvoir d’achat de la population n’a pas permis l’aboutissement de tous les projets initiés en 2007.

Le gouvernement provincial du Kongo central cependant a initié en 2007 la construction des résidences pour les agents et fonctionnaires de la province dans les chefs-lieux des territoires et la réhabilitation de quelques camps militaires dans la ville de Matadi (Kuna Maba, 2009 :241). Selon Robert Lubaba, Maire de la ville de Lubumbashi, dans la province du Haut-Katanga, le gouvernement provincial avait initié plusieurs projets de construction des logements sociaux qui sont restés inachevés faute des moyens[5]. L’on peut déduire, au regard de ce qui précède, que les politiques de logement peuvent se résumer en un chapelet de bonnes intentions. Les projets de construction des logements n’étaient destinés qu’aux plus nanties. La villa moins chère dans la cité du fleuve, à Kinshasa, revient à 150 000 usd, payable en cash. C’est pratiquement le même prix des appartements modernes construits dans la ville de Lubumbashi.

De manière globale, l’épineuse équation de logement, surtout dans les grandes villes, n’a pas aussi été prise en charge de manière satisfaisante. L’absence de stratégies efficaces et l’incapacité des acteurs gouvernementaux à qui ces secteurs ont été confiés peuvent être retenues comme des facteurs explicatifs de la léthargie observée.

On peut déduire globalement de l’analyse des différentes politiques que les secteurs de la santé et de l’éducation étaient plus en mouvement par rapport à ceux de l’emploi et du logement. Cette situation s’explique par la sensibilité des deux premiers, leur prise en charge par les gouvernements provinciaux et les revendications des professionnels.

En 2007, le gouvernement national avait comme slogan « travailler pour les cinq chantiers de la République ». Il s’agissait des priorités gouvernementales suivantes : routes, énergie, santé, éducation et emploi. Toute la politique gouvernementale tournait autour de ces priorités. Mais les résultats étaient en dessous de la moyenne pour ces priorités. En 2012, après le renouvèlement de son mandat, le président confia au gouvernement la responsabilité de moderniser le pays dans toutes les dimensions. Ce qui laissa le goût de l’inachevé dans les cinq priorités de 2006 et plaça le pays dans le tâtonnement organisationnel. A partir de 2016, le pouvoir qui était hors délai constitutionnel s’est contenté de conserver le pouvoir en abandonnant même le projet de modernisation du pays.

Au niveau des provinces, les différents gouvernements avaient initié des politiques sociales dans les secteurs analysés. Deux provinces avaient battu le record dans l’amélioration des conditions de vie des populations : le Katanga, avec le gouverneur Katumbi et le Kongo Central avec le gouverneur Mbatshi.

 Entre 2007 et 2018, le pays assisté au retour en force de la place de la femme. L’article 14 de la nouvelle constitution est clair en stipulant : « les pouvoirs veillent çà l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard de la femme et assurent la protection et la promotion de ses droits… La femme a droit à une représentation équitable dans toutes les institutions ».  La loi n°15/013 du 1 aout 2015 prévoit que 30% des postes des responsabilités soient confiées à la femme.

 Au cours de cette période, l’on a assisté aussi à la multiplication des organisations pour la défense et la promotion des droits de la femme. La ministre de la femme et famille ainsi que la première dame étaient activement au front pour la promotion de la femme. La journée du 08 mars était l’occasion pour les organisations féminines d’évaluer leurs actions et de repriser leurs échecs. Les organismes internationaux présents au Congo, ont, quant à eux, soutenu remarquablement les politiques publiques qui promouvaient la femme congolaise.

 Ainsi, au niveau du gouvernement central, dans les assemblées et gouvernements provinciaux, et dans les entreprises et établissements publics, les femmes ont été systématiquement propulsées. Le nombre des femmes comme professionnelles de santé et de l’éducation n’était pas négligeable. Dans le recrutement, à compétence égale, la priorité est systématiquement accordée à la femme.

Les politiques sociales initiées et mises en œuvres sous le leadership du président Kabila ont permis au pays, en l’espace de 12 ans, de connaitre des réformes transformationnelles. La construction des écoles et des hôpitaux a eu des effets d’entrainement sur l’emploi. La mécanisation des enseignants et du personnel de santé non payés et l’augmentation des salaires des agents et fonctionnaires de l’Etat ont contribué, tant soit peu, à l’amélioration des conditions de vie des concernés.

6 – La période de COVID-19

Le problème de chômage des jeunes, déjà observé dans toutes les villes du pays avant la pandémie, s’est posé avec acuité en 2020. Cette situation résulte de la fermeture en cascade des entreprises. Il s’en est suivi un assainissement du personnel en dépit la recommandation du gouvernement interdisant le licenciement du personnel durant la période de confinement.

Au niveau du logement, la mesure gouvernementale la plus importante était la suspension durant trois mois, soit de mars à juin 2020, du paiement des frais loyer et l’interdiction à tout bailleur de résilier, quelle qu’en soit la raison, le contrat de bail.

L’on peut déduire, qu’en deux ans d’exercice du pouvoir, l’action étatique du nouveau régime n’est jusqu’ici perceptible que dans les secteurs de l’éducation et de la santé. La mise en œuvre de la gratuité à l’école primaire reste la politique sociale phare au moment où la lutte contre la COVID-19 a volé la vedette à tous les autres aspects de la santé. Les deux autres secteurs n’ont pas été pris en charge faute d’une approche stratégique et opérationnelle des dirigeants, préoccupés par la consolidation de leur pouvoir. 

L’arsenal juridique relatif à la promotion et à la défense des droits de la femme n’a pas évolué entretemps. Mais la dynamique mise en place depuis 2007 n’a pas baissé avec le nouveau régime. Mais des efforts particuliers pour mettre la femme en pole position n’est sont pas encore perceptibles.

Comme entre 2006 et 2018, les institutions nationales et provinciales sont celles qui censées jouer le rôle d’avant plan dans l’initiation et la mise en œuvre des politiques sociales. Ainsi, le président de la République, les ministres sectoriels et les gouverneurs de provinces sont des acteurs clés dans l’implémentation des politiques sociales.

Il est certes difficile de faire une évaluation des politiques sociales mises en place par le nouveau régime, il y a à peine deux ans. La crise de légitimité après la publication des résultats électoraux, l’absence d’une majorité parlementaire totalement acquise au nouveau pouvoir, la guerre interminable dans l’est du pays, l’amateurisme des nouvelles autorités, la corruption généralisée ont, somme toute, réduit l’efficacité de l’action gouvernementale. Déjà considéré comme un pouvoir issu de la fraude électorale, le gouvernement est toujours en quête d’une certaine légitimité. Ceci constitue un facteur qui devrait plutôt l’amener à poser une série d’actions au bénéfice de la population. C’est plutôt le contraire, avec l’esprit politiste, la tendance vouloir résoudre les problèmes politiques par la politique à travers des conciliabules, des débauchages, l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire, etc. Ce qui entraine à la fois incurie et diversion. 

L’instabilité des institutions provinciales est une autre contrainte majeure. En l’absence des rétrocessions financières du gouvernement central durant plus d’années, les provinces n’ont fonctionné qu’avec les maigres recettes propres. On retrouve ainsi les députés de toutes les provinces accumuler 13 mois sans émoluments. Il en est de même pour le personnel politique des cabinets des gouverneurs et des ministres provinciaux.

L’on doit noter que les demandes populaires sont toujours plus pressantes. La liberté d’opinion, avec les réseaux sociaux constitue des moyens de pression pour pousser le gouvernement à agir. L’appui de la communauté internationale et des organismes de toutes sortes est une autre opportunité même si, au fond, cette approche de la sébile tendue est toujours un signe de faiblesse et de la léthargie de l’action gouvernementale

[1] Lire à cet effet David REYBROUCK, Congo une histoire, Bebel, Amsterdam, 2012, p364-424.

[2] De nos entretiens avec Loka ne Kongo.

[3] Lire à cet effet, Joël MUKUMADI, La crise au Congo-zaïre. Le Belgique au centre du drame congolais, CIEDOS, 1986, CAPELAERE Pierre, Congo (RDC). Puissance et fragilité, L’Harmattan, Paris, 2011, REMILLEUX JEAN LOUIS, Mobutu. Dignité pour l’Afrique, Albin Michel, Paris, 1989, N’GBANDA NZAMBO-KO-ATUMBA, Ainsi sonne le glas ! Les derniers jours du Maréchal Mobutu, GIDEPPE, Paris, 1998.

[4] De nos entretiens avec clément Nzau, Directeur Honoraire de la Direction Générale de Logement de Kinshasa.

[5] De nos entretiens avec Robert LUBABA, Maire de la ville de Lubumbashi.